Quand tout revedient (presque) normal... [PV: NoeruxToma]

Il était encore tôt, mais Toma, déjà réveillé avait décidé de se rendre à la plage. Il avait besoin de réfléchir à propos de ce que la jeune fille lui avait dit hier. Alors comme ça, lorsqu'il avait joué avec Noeru, il avait torturé Naomi... Il entrait dans une réflexion qui le remit grandement en question. S'il faisait souffrir Naomi, alors Noeru en paierait les frais et ça, il ne le voulait pas. Elle avait visiblement déjà assez souffert comme ça.

Bien que toujours malade et malgré la température très basse, le professeur de sport s'était mis torse nu, il voulait ressentir le froid, le vent... Il en avait eu assez d'être enfermé chez lui, sous une couverture chaude, à prendre des médicaments écœurants.

Il s'était allongé sur le sable froid et humide, Noeru et Naomi occupant toujours ses pensées... Noeru lui manquait, mais visiblement, faire souffrir Naomi et briser son cœur n'était pas la bonne solution pour la faire revenir. Il s'ébouriffa la tête, regardant le ciel sombre encore, mais dont on distinguait bien les nuages, qui menaçaient d'éclater à tout instant et d'apporter la pluie sur la ville.

Le roux soupira. Depuis quelques temps, sa vie s'était compliquée à un tel point que lui-même, des fois, avait du mal à suivre lorsqu'il se remémorait les faits. Il commença à s'endormir dans le sable frais, mais un bruit l'en empêcha, un bruit de pas. Le professeur se serait bien retourné pour voir qu'elle personne avait eu le courage de s'aventurer ici si tôt, alors que la marée venait tout juste de redescendre, mais il fut prit d'une paresse sans nom à cet instant, et il resta couché, mimant le sommeil.

Lorsque la jeune fille se réveilla, elle se rendit compte qu'elle avait malheureusement chopé la fièvre de Toma. Pas grand-chose, mais elle ne se sentait pas bien. Puis, il y eut cette irrésistible envie de ne pas se rendre en cours. C'était décidé à la place elle irait se changer les idées... Elle enfila sa robe noire, ses collants, mit ses cache oreilles et passa la chaîne à laquelle était accroché sa précieuse petite horloge, autour de son cou. Exceptionnellement elle ne mit pas sa perruque, ni ses lentilles de contact. elle préféra les lunettes qui traînaient dans les affaires de Noeru. Elle attacha ses cheveux en chignon et mit un manteau qu'elle n'avait jamais porté jusque là. Ce dernier était couleur corbeau et lui arrivait mi-cuisses. Si elle avait fait le choix de se "déguiser", ou plutôt de ne pas le faire, c'était parce qu'elle allait sécher et que si on la reconnaissait, elle, la déléguée de classe, elle allait être dans de beaux draps.

Elle quitta la petite pièce lui servant de chambre, en faisant attention à ne pas se faire voir pas les autres élèves ou pire, par les professeurs. Il devait être sept heures trente et les premiers adolescents quittaient leur piaule dans le but de se rendre dans leurs classes respectives. Heureusement pour elle, elle ne croisa personne et parvint à quitter le bâtiment sans encombres.

Le chemin qu'elle avait emprunté au hasard l'avait mené droit à la plage. Elle n'avait jamais vu cet endroit et le trouvait magnifique. Elle aimait le bruit des vagues, crépitant joyeusement au grès des vas et viens de la mère s'interrompant docilement sur une faible pente de sable fin. La jeune fille regardait l'horizon, émerveillée. Il y avait cependant un point qu'elle n'appréciait guère. L'aire auprès de l'eau se faisait plus frais et ses joues étaient rougies par le froid.

L'horloge sonna huit coups. La jeune fille, pour contrôler, ou simplement par toc, tira sur la chaîne pour faire apparaître l'objet de sous son manteau. Elle regarda l'heure et lâcha la pendule, avec délicatesse tout de même. Elle prenait grand soins de son pendentif, qui lui était extrêmement cher.

Elle finit par remarquer son professeur, allonger sur le sable froid et humide du matin. Elle s'approcha de lui et lui déclara avec une voix légèrement enroué:

"Si vous faites une rechute, je ne prendrais pas le temps de vous hisser sur votre lit et encore moins celui de vous tenir compagnie..."

Toma entendit un petit tintement provenant apparemment de la personne présente avec lui sur cette plage. Il se retourna après avoir entendu la voix de ce qu'il pouvait identifier comme une voix de jeune fille. Il se leva, se rhabilla et s'approcha d'elle.

Cette voix, il la reconnaissait, mais comme celle-ci avait un timbre différent de celui qu'il connaissait. Il s'approcha donc doucement de la jeune fille en question. Puis, une fois face à elle, il la reconnut et cela le frappa de plein fouet. Des cheveux noirs, des yeux bleus légèrement masqués par une paire lunettes... Pas de doute possible.


"N-Noeru ?"


Il ne put s'en empêcher, il la prit dans ses bras, la serrant si fort qu'elle ne pourrait plus partir. Dans cette accolade, il lui montrait à quel point il était désolé et à quel point elle lui avait manqué. Mais un bruit interrompit ces retrouvailles que Toma attendait depuis maintenant presque deux semaines. Un léger bruit qui traduisait la chut d'un bijou au sol, et bien qu'il soit tombé sur du sable, on avait tout de même entendu le contact, étant donné que tout était silencieux.


"Oh excuse-moi..."


Il s'abaissa, ramassa le collier et le remit autour du cou de Noeru. Il était tellement réjoui de la revoir ici, face à lui. Plus rien n'importait à Toma en ce moment. Il lui prit les mains et lui sourit.


"Tout ce qu'on peut dire, c'est que t'as réussi à te faire désirer..."

"N-Noeru?"

Elle le regarda impassible. Il avait cru que sa chère amie était revenue? Elle conclut que c'était à cause du fait qu'elle ne se soit pas déguisé ce matin-là. Elle s'apprêtait à lui faire remarquer que la personne qu'il avait devant les yeux était toujours elle, Naomi, mais elle fût interrompue par son étreinte. Le jeune homme la serrait si fort contre lui, son coeur battait la chamade... Jusqu'à ce que la chaîne qui retenait sa précieuse petite horloge se décroche de son cou. L'objet était lourd, mais elle connaissait sa fragilité. La pendule s'enfonça donc dans le sable blanc, qui pénétrait à l'intérieur du mécanisme. Elle sentait que c'était la fin. Elle ne le sentit pas raccrocher la chaîne derrière sa nuque. Elle ne sentit pas non plus la sensation de ses mains prenant les siennes. Elle perdait peu à peu la vue et n'entendait de moins en moins le bruit de l'eau qu'elle aimait tant. Kyogi dans un acte désespéré, rassemblant ses dernières forces, secoua la pendule pour faire sortir le maximum de sable. Mais il était trop tard.

Ses paupières se fermèrent et son corps tomba.

Noeru rouvrit les yeux. Elle ne comprenait pas. Elle ne savait pas où elle se trouvait. Son dernier souvenir était celui de la "rupture". Lorsque Toma lui avait dit qu'il était trop bien pour elle. Elle entendait les vagues et la pluie qui s'esclaffait contre son visage. Puis un violant mal de crâne. De la fièvre? Mais comment était-ce possible? Quand avait-elle quitté le toit? Elle était totalement perdue.

Elle vit alors qu'elle était dans les bras de son professeur. Son regard s'assombrit et elle se dégagea.

"Excuse-moi mais je ne suis pas assez bien, pour encombrer tes bras."

Le temps que Naomi avait utilisé le corps de Noeru c'était "détruit" en même temps que l'horloge. Noeru ne s'imaginait pas une seconde qu'il s'était passé plus de deux semaines depuis la dernière fois qu'elle l'avait vu.

La phrase que venait de dire la jeune fille frappa Toma de plein fouet. Alors ainsi elle avait tout oublié ? Tout ce qui s'était passé ? Il ne savait pas quoi répondre car, après tout, c'était le retour de manivelle et il devait s'y attendre, même si c'était plus douloureux que ce qui'l avait prévu.

Il ne tenta pas de la garder pour elle, ses bras retombèrent le long de son corps et il se mit à la regarder droit dans les yeux, fixant son regard océan et fatigué.


"Alors t'as oublié tout ce qui s'est passé ?... Pendant ces deux semaines ?"


Il posait la question comme pour s'en assurer, bien qu'il avait déjà eu la réponse. A vrai dire s'il y avait bien quelque chose qu'il n'avait pas prévu, c'était ça. Il ne savait plus quoi faire, et il lui expliquerai seulement si elle le lui demandait, car pour lui, il valait mieux passer sa vie en étant incompris que de passer son temps à s'expliquer.

A présent il attendait une réponse à sa question, bien qu'il en connaissait déjà la réponse, il voulait l'entendre de la bouche de la jeune fille.

Elle le regarda sans comprendre. De quoi parlait-il? Deux semaines s'étaient écoulées depuis qu'elle avait écrasé les biscuits?

Sa température chuta brusquement et la jeune fille fût parcourue d'un frisson. Mais elle n'y prêta pas attention...

"Q-qu'est-ce qu'il s'est passé..."

Elle était déboussolée. C'était la première fois qu'elle perdait la mémoire. Elle le regardait dans les yeux de son professeur, comme si elle espérait y lire une réponse.

Sa voix était faible, la température était trop froide et ça ne la réussissait pas. Elle était bien assez couverte, ce n'était pas ça le problème. Le problème c'était qu'elle dépensait une énergie monstre rien que pour tenir debout. Le pire c'est qu'elle ne savait même pas comment elle avait chopé la maladie. Elle n'était pas au courant que le soir d'avant, elle s'était rendue chez Toma. Elle ne se souvenait ni des monstres efforts qu'elle avait fait pour le hisser sur son lit alors que le jeune homme était nu sous un simple peignoir, ni du fait qu'elle avait faillit ressauter de cette fameuse fenêtre, qui avait réussi à lui provoquer une peur prononcée des hauteurs.

Elle continuait d'attendre sa réponse, un regard pesant posé sur le beau roux. Elle ignorait le crépitement des vagues, le poids de l'horloge tirant sur la chaîne ainsi que son affaiblissement qui se faisait de plus en plus ressentir.

Toma observa bien la réaction de Noeru à sa question. Elle était perdue, et visiblement, ne savait plus où elle en était. Elle soutint le regard de Toma, comme si elle y trouverait sa réponse, comme si, en un simple regard, il avait pu tout lui expliquer.

Lorsqu'elle lui demanda d'une voix faible ce qui s'était passé, Toma s'approcha d'elle, dans le cas où elle tomberait, il serait là pour la rattraper.

Toma avait envie de lui dire ce qu'il s’était passé pendant ces deux semaines, lui dire à quel point il avait mal vécu le fait qu'elle ne soit plus elle-même pendant


" Pendant ces deux semaines, t'as laissé ta place a Naomi."


Il ne lui avait pas avoué tout ce qu'il avait ressenti pendant ces deux semaines, il fuyait toujours, il ne voulait toujours pas se l'avouer et il savait qu'ainsi, la jeune fille n'allait pas tarder à lui échapper. Il était hors de question qu'il la perde de nouveau.

Il l'attira contre lui, il ne la lâcherait plus, c'était décidé.

Naomi... C'était impossible, Naomi n'existait pas vraiment... comment aurait-elle pu.. Puis, un contacte. La chaleur et la douceur de son étreinte... Elle se sentait bien mais...

"Lâche moi. Tu m'as dit que tu ne voulais pas de moi, tu m'as fait comprendre que j'étais comme les autres, j'ai compris, alors lâche moi."

Elle se sentait torturée. Et bien qu'elle lui ait demandé de la lâcher, elle le serra plus fort. Ça devait être la fièvre qui apportait cette incohérence. Comme si son cerveau n'arrivait à contrôler que la bouche et que son coeur avait pris en charge le reste de son corps. Il avait réussi à la détruire mentalement, mais sans parvenir à affecter l'amour qu'elle lui portait.

Elle commençait à grelotter et avait de plus en plus de mal à tenir sur ses jambes.

"Qu'est-ce que j'ai fait.. Pour mériter ça..."

Elle ne s'adressait évidemment pas à Toma, c'était à elle-même que la question était posée. De toute manière le son de sa voix était à présent si faible qu'il était difficile de l'entendre.

La jeune fille ferma les yeux et s'accrochait au bruit des vagues pour ne pas lâcher, elle luttait, voulant rester consciente le plus longtemps possible. Elle en avait marre d'être un boulet pour Toma et elle ne voulait pas avoir une nouvelle raison de lui être redevable.

Toma ne l'écouta pas lorsqu'elle lui demanda de la lâchait. C'était hors de question, elle pourrait partir de nouveau loin de lui et il ne le supporterait pas. Toma la sentit frissonner, sûrement à cause du froid et il l'entendit alors demander ce qu'elle avait fait pour mériter ça.

Toma comprit alors à quel point il l'avait fait souffrir et à quel point elle lui était chère. Il s'en voulait énormément, et il resserra son étreinte, comme pour lui promettre qu'il ne la ferait plus souffrir. Oui, Toma ne parlait pas beaucoup, il préférait se dévoiler à travers des gestes qui, d'après lui sont beaucoup plus expressifs que les mots. Cependant, malheureusement pour lui, peu de jeunes filles pouvaient comprendre ça. Il se lança tout de même.


"Je suis désolé... Je te laisserais plus jamais."


C'était une promesse, et il espérait qu'elle l'aurait compris. Il la regarda alors, et vit que ses yeux étaient clos. Paniqué, il se mit à secouer délicatement. Il espérait que cela suffirait à lui faire reprendre ses esprits...

Elle laissa réapparaître ses iris bleus roi, après la légère secousse qu'il venait de lui administrer. Elle n'était tout de même plus très alertes et avait les joues rougies par le froid et par la fièvre.

"Je t'aime tellement..."

Bien qu'elle ait dit ça sur le coup de la maladie et que dans quelques heures elle ne s'en souviendrait sans doute plus le moins du monde, ce qu'elle venait de déclarer était parfaitement sincère. À présent elle ne tenait absolument plus sur ses jambes, elle avait besoin du maintient de Toma et ses yeux étaient mi-clos.

Elle avait de plus en plus de mal, ses forces l'abandonnaient, mais elle ne voulait pas perdre conscience.

"J-je ne me sens... Pas très bien..."

En réalité, le virus n'était pas la seule origine de cet affaiblissement. L'énergie qu'elle avait dépensé pour récupérer son corps était aussi une cause directe. Elle était épuisée.

La pluie se fit de plus en plus forte et les vagues suivaient le mouvement. Elles se déchaînaient et le son qu'elles produisaient n'en était que plus assourdissant.

"Je t'aime tellement..."

Toma sourit à l'entente de ces mots, et il serra Noeru un peu plus forts. Oui, lui aussi, lui aussi il l'aimait, seulement voilà, il était têtu et il avait peur. Ressentir le moindre sentiment le faisait fuir et ce cas là n'était pas une exception.

Il l'entendit soupirer qu'elle ne se sentait pas très bien. Toma continua de sourire un instant, puis il reprit rapidement ses esprits et vit que Noeru était plus que faible, au bord de l'épuisement. Il la souleva et la prit dans ses bras. Décidément, elle lui en aurait fait voir de toutes les couleurs.

Il marchait vers le lycée, cette fois, il ne ferait pas l'erreur de l'emmener chez lui, il ne voulait pas qu'un malentendu revienne s'immiscer dans leur relation qui était en train de s'arranger. Arrivés au lycée, Toma se dirigea, d'abord sans réfléchir, vers l'infirmerie, sous les yeux médusés des autres élèves, qui se demandaient ce que faisait le professeur de sport avec cette élève. Toma savait que, de toute manière, pour sa défense, il pourrait dire qu'il l'avait trouvée évanouie pas très loin, et qu'il aurait été odieux de sa part que de la laisser là-bas, sous la pluie...

Il entra finalement dans cette infirmerie. Il se souvint alors de l'identité de l'infirmier: Klaüs. Même s'il le détestait, il le salua poliment et déposa Noeru sur le lit.

Finalement, il décida de provoquer l'infirmier. Étant donné qu'il n'était que tous les deux et que Klaüs savait à présent que la jeune fille allongée était Noeru, Toma déposa ses lèvres sur celles de la jeune fille endormie puis il lui murmura un faible "Désolé". Il se releva ensuite, après quelques secondes, il jeta un regard arrogant à Klaüs, accompagné d'un sourire.


" Je te la confie."


Il lui adressa un signe de la main et sortit de l'infirmerie. C'était une magnifique journée qui commençait là.